Les mencheviks : origine, histoire et idéologie

I.​ Introduction

Le mouvement menchevik est une composante majeure du socialisme russe, ayant joué un rôle clé dans la Révolution russe et la formation de la Géorgie moderne.

A.​ Contexte historique

Le contexte historique qui a vu émerger les mencheviks est marqué par la montée du mouvement ouvrier en Russie à la fin du XIXe siècle.​ Les idées socialistes et marxistes se répandaient rapidement parmi les travailleurs russes, qui étaient confrontés à des conditions de vie difficiles et à une répression gouvernementale accrue.​

La Révolution russe de 1905, qui vit l’émergence d’un mouvement révolutionnaire massif, démontra la faiblesse du régime tsariste et créa un contexte favorable à l’émergence de nouvelles forces politiques.​

C’est dans ce contexte que le Parti ouvrier social-démocrate de Russie (POSDR) fut créé en 1898, regroupant des militants socialistes et marxistes russes. Cependant, des désaccords sur la stratégie et la tactique allaient rapidement apparaître au sein du parti..​.​

II.​ Origine des mencheviks

La scission du Parti ouvrier social-démocrate de Russie (POSDR) lors du IIe congrès en 1903 donna naissance aux mencheviks, qui prirent le nom de “minorité” en russe.

A.​ La scission du Parti ouvrier social-démocrate de Russie

La scission du Parti ouvrier social-démocrate de Russie (POSDR) eut lieu lors du IIe congrès tenu à Londres et Bruxelles en 1903.​ Cette réunion devait définir les statuts du parti et élire son comité central. Cependant, les débats sur l’organisation du parti et la tactique à adopter pour atteindre le pouvoir divisèrent les délégués. Lénine et ses partisans, qui défendaient une organisation centralisée et une tactique révolutionnaire, s’opposèrent à Julius Martov et ses supporters, qui préconisaient une organisation plus démocratique et une tactique plus modérée.

La controverse porta principalement sur la question de l’adhésion au parti et du rôle du comité central.​ Lénine et ses partisans, qui allaient devenir les bolcheviks, obtenaient la majorité des voix sur ces questions, tandis que Martov et ses partisans, qui allaient devenir les mencheviks, formaient la minorité.​

B.​ Les leaders mencheviks

Les leaders mencheviks étaient essentiellement des intellectuels russes issus de la bourgeoisie ou de la petite bourgeoisie.​ Julius Martov, l’un des fondateurs du POSDR, fut l’un des leaders les plus influents du courant menchevik.​ Il était connu pour ses prises de position modérées et son rejet de la violence révolutionnaire.​

D’autres leaders mencheviks notables furent Georgy Plekhanov, considéré comme l’un des pères du marxisme russe, et Pavel Axelrod, qui joua un rôle clé dans la fondation du POSDR.​ Irakli Tsereteli, qui devint ministre des Postes et Télégraphes dans le gouvernement provisoire russe en 1917, fut également un leader menchevik influent.

Ces leaders mencheviks ont contribué à façonner l’idéologie et la stratégie du mouvement menchevik, qui s’est développé en opposition au bolchevisme de Lénine et de Trotski.​

III.​ Histoire des mencheviks

La histoire des mencheviks est marquée par leur implication dans les révolutions russes de 1905 et 1917, ainsi que leur rôle dans la Guerre civile russe qui suivit.​

A. La Révolution russe de 1905

La Révolution russe de 1905 fut un tournant décisif dans l’histoire des mencheviks. Cette année-là, la Russie impériale fut secouée par une vague de grèves et de manifestations qui culminèrent avec la création du Soviet de Saint-Pétersbourg, organe révolutionnaire autonome.​

Lors de cette révolution, les mencheviks jouèrent un rôle crucial en tant que médiateurs entre les travailleurs et les libéraux.​ Ils contribuèrent à la formation du Soviet et à la diffusion des idées révolutionnaires.​

Cependant, la répression gouvernementale fut rapide et violente, entraînant la dissolution du Soviet et la répression des mouvements sociaux.​ Malgré cet échec, la Révolution de 1905 permit aux mencheviks de gagner en popularité et en influence au sein du mouvement ouvrier russe.​

B.​ La Révolution d’Octobre et la Guerre civile russe

En 1917, les mencheviks furent divisés face à la Révolution d’Octobre, qui porta les bolcheviks au pouvoir.​ Certains, comme Irakli Tsereteli, soutinrent le gouvernement provisoire, tandis que d’autres, comme Ioulia Martov, s’opposèrent à la prise de pouvoir bolchevique.​

Lors de la Guerre civile russe, les mencheviks combattirent aux côtés des armées blanches contre l’Armée rouge bolchevique. Cependant, leur refus de s’unir aux socialistes-révolutionnaires et aux libéraux les rendit vulnérables face à la puissance militaire bolchevique.​

Finalement, les mencheviks furent vaincus et leur parti interdit en 1922.​ De nombreux mencheviks furent emprisonnés, exilés ou exécutés, mettant fin à leur rôle politique en Russie soviétique.​

IV. Idéologie menchevique

L’idéologie menchevique repose sur une interprétation réformiste du Marxisme et du Socialisme, privilégiant l’évolution graduelle et démocratique vers le socialisme.​

A.​ Le Marxisme et le Socialisme

Les mencheviks se revendiquent du Marxisme et du Socialisme, mais leur interprétation diffère de celle des bolcheviks.​ Ils considèrent que la révolution russe est une révolution bourgeoise, qui doit aboutir à l’établissement d’une démocratie parlementaire.​

Ils estiment que la classe ouvrière russe n’est pas encore suffisamment développée pour prendre le pouvoir et qu’il est nécessaire de passer par une phase de développement capitaliste pour créer les conditions d’une révolution socialiste.​

Cette approche réformiste les oppose aux bolcheviks, qui prônent une révolution prolétarienne immédiate.​ Les mencheviks considèrent que la démocratie et les libertés individuelles sont essentielles pour le développement du socialisme.​

Ils s’appuient sur les écrits de Marx et d’Engels, qui préconisaient une évolution graduelle vers le socialisme, pour justifier leur stratégie.​

B.​ La critique du Bolchevisme

Les mencheviks ont toujours été critiques envers le Bolchevisme, qu’ils considèrent comme une forme de dictature et non comme une véritable démocratie socialiste.​

Ils dénoncent la centralisation autoritaire du pouvoir entre les mains de Lénine et de Trotski, qui selon eux, ont trahi les principes de la Révolution d’Octobre.​

Ils estiment que la répression de la Guerre civile russe et la terreur exercée par la Tcheka contre les opposants politiques sont incompatibles avec les idéaux socialistes.​

Les mencheviks reprochent également aux bolcheviks leur mépris pour les institutions démocratiques et leur refus de reconnaître les droits des minorités.​

Ils considèrent que le régime bolchevik est un exemple de dérive autoritaire et que son modèle ne peut pas être considéré comme un modèle de socialisme démocratique.​

V.​ Conclusion

En résumé, les mencheviks ont laissé un héritage complexe, marqué par leur engagement pour la démocratie et le socialisme, mais également par leurs erreurs et leurs échecs face au Bolchevisme.​

A.​ Bilan de l’histoire des mencheviks

Le bilan de l’histoire des mencheviks est contrasté.​ D’un côté, ils ont contribué à la diffusion des idées socialistes en Russie, ont joué un rôle actif dans la Révolution russe de 1905 et ont été les défenseurs de la démocratie et des libertés individuelles.​ Ils ont également été les premiers à alerter sur les dérives autoritaires du régime bolchevique.​

D’un autre côté, les mencheviks ont échoué à prendre le pouvoir en 1917 et ont été vaincus lors de la Guerre civile russe. Ils ont également été critiqués pour leur incapacité à offrir une alternative crédible au Bolchevisme et pour leur propre radicalisation.​

Néanmoins, l’histoire des mencheviks montre que le socialisme démocratique est possible et que la lutte pour les libertés et les droits de l’homme est essentielle dans tout système politique.​

B.​ L’héritage menchevique

L’héritage menchevique est multiple et varié. Les mencheviks ont contribué à la diffusion des idées socialistes et démocratiques en Russie et en Géorgie, et ont inspiré de nombreux mouvements sociaux et politiques dans le monde.

Ils ont également laissé un héritage intellectuel important, notamment à travers les écrits de leurs leaders, tels que Lénine et Trotski, qui ont contribué à enrichir la théorie marxiste et socialiste.​

Enfin, l’expérience menchevique a montré que le socialisme et la démocratie ne sont pas incompatibles, et que la lutte pour les libertés et les droits de l’homme est essentielle dans tout système politique.​

Cet héritage continue de inspirer les militants et les intellectuels qui cherchent à concilier le socialisme et la démocratie.​